Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Humeur de nain

D'un François à l'autre, l'abstention au droit de vote.

10 Novembre 2015 , Rédigé par Philippe Blard Publié dans #Politique

D'un François à l'autre, l'abstention au droit de vote.

Les promesses n'engagent que ceux qui y croient. L'expression a fait flores depuis plusieurs décennies et ce n'est pas l'actualité de ces derniers mois qui la poussera vers la désuétude. Non que nous ayons cru aux promesses des constructeurs automobiles lorsqu'ils vantaient leurs diesels "vert", ou aux multinationales qui, quotidiennement, nous vantent de produits "Bio" et industriels. Si Monsanto faisait dans le naturel cela se saurait, et il serait primé par Greenpeace et consorts. Le "greenwashing", on s'était habitués, on n'était pas dupes. Le "brainwashing" aussi d'ailleurs, en version soft incarné par la publicité et le marketing, comme en plus hard et politique, avec ses représentants les plus dictatoriaux, d'Adolf aux Kims Nord-coréens, en passant par le Benito et le "guide" Joseph. Mais nous ne sommes plus au siècle dernier, et si de nombreuses dictatures subsistent à travers le monde, la France est depuis 1789 -hormis quelques épisodes relativement courts au regard de l'Histoire- une république ou le peuple confie son destin à ses dirigeants sur la base d'un projet politique, et par le biais du vote.

C'est d'ailleurs ce principe qui nous a permis d'échapper jusqu'ici à la peste brune, et ce, même si sous notre Vème république, du premier choc pétrolier aux crises plus récentes, scrutin après scrutin, nombreux sont les écarts entre les promesses et la réalité de leurs mises en œuvre. Mais il en est une, vieille de plus de 30 ans, à laquelle le peuple de gauche dans sa grande majorité, et moi le premier, avons eu la naïveté de croire qu'en 2012 elle deviendrait réalité : le droit de vote des résidents étrangers (non communautaires) aux élections locales.

Il faut dire que depuis la résolution adoptée en 1980 par la Ligue des Droits de l'Homme (LDH), et la reprise de cette volonté par François Mitterrand dans ses engagements de 1981, les atermoiements de ce dernier après son élection, puis celles de son parti et les alternances politiques jusqu'en 2012, sont pour le moins édifiantes*. Argument suprême, le "peuple" n'était, nous disait-on alors "pas prêt". Probablement pas plus qu'il ne l'était en 1974 pour le droit à l'avortement, et moins encore en 1981 pour l'abolition de la peine de mort.

Mais en 2011, selon une enquête d'Harris Interactive 59% des sondés s'y déclarent favorables. Le candidat Hollande en fait son cinquantième engagement de campagne. Une volonté forte, qui n'a pas été sans conséquences sur la mobilisation de l'électorat des quartiers populaires en faveur du candidat socialiste, après 5 ans d'une présidence affligeante et une campagne du candidat Sarkozy qui draguait ouvertement les électeurs marinistes. Une mobilisation "contre" la bête immonde, mais aussi "pour" un programme social, humaniste et républicain, qui accorderait le droit de vote à leurs frères, leurs pères et leurs voisins.

Une fois élu le candidat "normal", nous étions nombreux à espérer que ce serait donc un des premiers grands gestes politiques d'un gouvernement volontariste qui modifierait la constitution pour tenir son engagement. Allant pour cela chercher les 31 parlementaires (du centre et de droite) véritablement républicains nécessaires à un vote du congrès. Non, nos stratèges ont préféré attendre de perdre le Sénat, c'était moins fatiguant, et crise oblige, ils avaient mieux à faire. Et ne parlons pas de consulter très rapidement les français sur la question dans la dynamique des victoires de 2012 !

Enfin, pour parfaire le tableau, le 3 novembre 2015, Manuel Valls immigré espagnol qui n'a pu voter aux présidentielles de 1981 car il n'était pas encore naturalisé à l'époque, enterre définitivement le droit de vote, qu'il qualifie de "totem". Jean Christophe Cambadélis s'est bien agité à contredire son camarade en rappelant que cet engagement était toujours à l'ordre du jour du parti, tant une telle sortie était malvenue à la veille des élections régionales.

Si les promesses n'engagent que ceux qui y croient, les trahisons elles, désengagent ceux qui y ont cru. Alors les 6 et 13 décembre prochains, il est à craindre que le "totem" ne devienne plutôt symbole d'une abstention encore plus accrue de l'électorat des quartiers populaires. Et chacun sait aujourd'hui qui est la gagnante de ce jeu de dupes.

* Genèse d’un combat .. Chronologie d’une interminable bataille. Henri Leclerc, président d’honneur de la LDH. A lire dans Hommes & Libertés N° 161 de Mars 2013.

Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article